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Essai presenté dans la REVUE DE L’IEP, Paris

Décembre 1995
COMMENT RENVERSER LES MECANISMES SOCIOLOGIQUES DU CONFLIT VERS DES MECANISMES DE PAIX?

INTRODUCTION:

Il y a une centaine d’années, l’écrivain anglais H.G.Wells soulignait: « l’histoire humaine devient de plus en plus une course entre l’éducation et la catastrophe ».(La guerre des mondes) Ceux d’entre nous qui sont profondément concernés par cette course, avons la conscience qu’il faut faire plus que survivre au désastre et à la misère causés par les guerres. Cent ans plus tard, l’état des conflits dans le monde ne s’est amélioré guère. D'où donc l'émergence de ces nombreux conflits d’aujourd’hui? La guerre froide achevée, le monde doit à présent parer d'urgence à d'autres menaces pesant sur sa sécurité: la croissance démographique incontrôlée, la pollution et la dégradation de l'environnent, la pauvreté et la violence engendrant des migrations massives, l'exclusion sociale, la radicalisation, l'extrémisme et la guerre. L'actuelle multiplication des conflits n'est pas la conséquence de la liberté retrouvée dans les autocraties d'hier, mais plutôt le résultat de longues années d'oppression, de silence et de fermentation de la haine étouffée par le règne de la méfiance et de la peur. La paix ne pourra être rétablie que par la compréhension de cet étouffement du conflit et par sa detournoure vers une ouverture nécessaire. Le contexte de guerre permet de souligner l'importance de ce thème de réflexion: l'état de guerre constitue "un phénomène extrême pour toute société, un stade ultime de la violence "institutionnalisée". Elle engendre des mouvements de psychologie collective spécifiques, mais elle interpelle aussi de manière individuelle chaque citoyen qui a conscience de sa force sociale et politique et de son éventuel pouvoir sur les événements (l'opinion publique). Pour celui ci, l'exacte compréhension des moyens et des enjeux du conflit - en temps que "stade ultime de la violence"- est essentielle et le rôle de l'éducation et des médias, sensés lui permettre cette compréhension, est primordial. Ce projet se propose à étudier les mécanismes sociologiques du conflit, afin d’apprendre à les maîtriser, pour ainsi prévenir des manifestations violentes et destructives, ou si l'on veut être plus audacieux, apprendre à utiliser la sociologie du conflit pour identifier les mécanismes nécessaires afin de retisser une culture de paix.

1. PROBLEMATIQUE: La paix peut avoir des nombreuses significations: est-ce l’absence de guerre, est-ce le processus de réconciliation qui fait suite à un conflit armé, ou est- ce un contexte social où la guerre est peu susceptible à éclater?

Une culture de paix peut être définie comme l’absence de conflit, mais cette définition sera trop passive et ne peut pas être consistante avec un monde de diversités culturelles. Dans un monde de diversité, le conflit continue à être une partie intégrante de la vie. Au lieu de le craindre, il faut chercher à comprendre ses mécanismes, pour ainsi apprendre à cultiver ses aspects positifs et non-violents. "Les conflits sont inévitables et nécessaires et peuvent même présenter des avantages, en donnant lieu à certaines innovations et activités, à une affirmation des identités et à une réflexion. Ces avantages dépendront toutefois, de notre aptitude à gérer les conflits, à les résoudre équitablement et à prévenir leurs manifestations violentes et destructrices". (UNESCO, 140-ème session du Conseil exécutif). Dans une "culture de guerre", chacun se crispe dans l’attente du pire. Les différences entre individus et entre communautés ne sont plus l’expression du riche pluralisme qui nous a légué l’histoire, mais deviennent des prétextes à la mobilisation des extrémismes. Cette étude se propose d'aborder quelques situations conflictuelles qui ont débouché sur la violence pour ensuite encourager l’analyse des alternatives non-violentes. D' après E. Durkheim (L' Education Morale) « Une société où les échanges se feraient pacifiquement, sans conflit d’aucune sorte, mais qui n’aurait rien de plus, ne jouirait encore que d’une assez médiocre moralité. Il faut, en plus qu’elle ait devant elle un idéal auquel elle tende. Il faut qu’elle ait quelque chose à faire, un peu de bien à réaliser, une contribution originale à apporter au patrimoine moral de l’humanité. L'oisiveté est mauvaise conseillère pour les collectivités, comme pour les individus. Quand l'activité individuelle ne sait pas où se prendre, elle se tourne contre elle- même. Quand les forces morales d’une société restent inemployées, quand elles ne s’engagent pas dans quelques oeuvre à accomplir, elles deviennent de leur sens moral et s’emploient d’une manière morbide et nocive. » Sa réflexion servira comme interrogation et moteur pour ce travail de recherche. Le conflit? Un état naturel de l'humanité? Les mythes pseudo scientifiques, soutenant que la violence est inhérente à la nature humaine ont mené certains chercheurs à penser que la guerre est l’état naturel de l’humanité, donc qu’elle serait inévitable. Cependant, d’autres chercheurs, parmi lesquels un groupe de sociologues et de scientifiques de l’Université de Sociologie de Madrid et de Séville ont répondu que "la biologie ne condamne pas l’humanité à la guerre" et que "l’humanité pourrait être libérée de ces mythes de pessimisme biologique" [...] "la même espèce qui a inventé la guerre est capable d’inventer la paix". (Rafael Lopez Pintor-Professeur de Sociologie, Madrid). La Déclaration de Séville sur la violence, la première du genre, qui a été élaborée par plusieurs éminents scientifiques et confirmée plus tard par des généticiens, confirme que l’homme n’a pas dans ses gènes de programme inné le prédisposant à l'agressivité ou à la violence, sauf dans les cas relevant de la psychopathologie. Même dans ces derniers cas, il est aujourd’hui possible, du moins en théorie, de manipuler les neuromédiateurs qui agissent sur différents récepteurs au niveau du cerveau, pour accroître ou diminuer le comportement agressif. C’est la bioéthique qui doit décider maintenant s’il faut intervenir ou non, et si oui, dans quelles circonstances. Les sentiments tels que la haine, les préjuges et l’intolérance sont clairement des réflexes acquis, qui peuvent conduire l’homme à agir pour se protéger, exercer de représailles ou avoir un comportement violent à l'égard d’autrui. Les résultats de ces travaux de recherche ont mené à cinq propositions principales. Il serait donc "scientifiquement incorrect" de dire que:

1. l'homme a hérité de ses ancêtres animaux la tendance à faire la guerre.
2. la guerre et d'autres formes de comportements violents sont programmées génétiquement dans notre nature.
3. pendant l’évolution humaine il y a eu une sélection favorisant les comportements agressifs, plutôt que d'autres types de comportement.
4. l'être humain à « un cerveau violent ». La façon dont il agit est contournée de la façon dont il a été éduqué et dont il a été « intégré » dans la société. Il n’y a rien dans notre neuropsychologie qui nous mène à réagir violemment.
5. la guerre est causée par l’instinct ou par toute motivation. Aussi, pour répondre aux mythes de l’inégalité et de la supériorité de la race, les mêmes chercheurs ont souligné que le concept de "race" reflète une image sociale assimilée à l’apparence physique des individus et non pas à celle des faits scientifiques basés sur des données spécifiquement biologiques. Y a t’il des méthodes pour éliminer le comportement agressif de l’homme?

Dans un dialogue entre Einstein et Freud suscité en 1932 (l’Institut international de coopération intellectuelle) Freud a essayé d’identifier les motifs qui poussent les êtres humains à commettre des actes de guerre et de violence. Selon lui, l’individu trouve un certain plaisir dans les actes agressifs et destructeurs. Nombre d’exemples de cruauté au cours de l’histoire ou d’incidents de la vie quotidienne confirment l‘existence et la force de tels motifs, qui sont souvent sous-jacents à d’autres motivations: sexuelles, idéalistes ou religieuses. Par conséquent, nous devrions nous employer, selon lui, non pas à éliminer totalement l’instinct agressif chez l’homme, mais à le détourner vers d’autres expressions que la guerre. La volonté de mettre fin à la souffrance et les privations dans la société, la lutte pour la justice, la quête de la vérité, le désir d’élever l’être humain à des niveaux supérieurs de perfection pourraient être le genre de motivations à encourager. La science du comportement a encore affirmé depuis cette approche et contribué à canaliser cet instinct en proposant de nombreux modèles modernes de réussite dans la vie. Deux traits essentiels de la modernité sont donc le renforcement de l’intellect sur le physique qui a commencé à dominer notre vie d’impulsions et l’intériorisation des pulsions agressives. Il n’y a aucun doute que l'éducation a un grand rôle à jouer, à côté de la famille, pour canaliser l’instinct agressif vers des modes civilisées d’expression, notamment la quête des valeurs humaines plus élevées.

II. OBJECTIFS: Ce projet se propose deux objectifs: D'une part, analyser les facteurs qui permettent à expliquer les mécanismes d'évolution du conflit pour essayer concevoir à l'aide des outils de la communication et de l’éducation des méthodologies pour anéantir ou même prévenir ces conflits. En effet, on va regarder comment d'une part les médias et d’autre part l’apprentissage global, les curricula éducationnels nationaux influence-t-ils une sociologie de conflit ou respectivement de paix. D'autre part, on va tracer un bilan provisoire, en étudiant les stratégies adoptées par les divers acteurs et en insistant sur les effets que ces stratégies ont pour les sociétés en conflit, afin d’identifier les mécanismes nécessaires pour retisser une culture de paix.A: Le conflit en relation directe avec l’actualité: Les médias: Information, Communication.

a) Les limites de l'information: Le pouvoir d’informer a une dimension primordiale. L’article XI de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen souligne que "la libre communication des pensées et des opinions est l’un des droits les plus précieux de l’homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ".

Ceci peut évidement être évoqué en cas de conflit, mais si l'on regarde le communiqué publié par Matignon en août 1990 qui affirme: "Le devoir d'informer n'a pas d'autres limites que celles que fixent les journalistes eux-mêmes", on peut rester perplexe, sans nier le droit d'un Etat à se protéger en temps de guerre et à veiller sur les limites de sa propre information, devenant elle-même une arme de guerre utilisable par "l'ennemi", souligner la vigilance accrue qu'exerce sur les médias les gouvernements et leur état-major, qui ont toujours tendance à vouloir limiter la liberté d'expression au nom d'une censure parfois illégitimement utilisée. Le droit d'informer à donc d'autres limites que celles fixées par les journalistes eux-mêmes. Malgré tout, il demeure intéressant de s’interroger sur la manière dont ces derniers fixent, par leur travail, les limites de l’information qu’ils proposent. L’ information prétend se poser en tant que "contre-pouvoir". Pour cela, les médias doivent être clairement dissociés des pouvoirs économiques et politiques et exercer constamment dans leur travail la dénonciation des abus, mais aussi des inaptitudes du système sociopolitique. D'après Marc Ferro, « En France, on assiste à une lente dérive, où petit à petit le contre-pouvoir se veut déjà pouvoir; en se plaçant au dessus du politique, alors qu’aux Etats-Unis, depuis longtemps, les médias et l’information constituent un pouvoir, mais un pouvoir bien délimité: « Quand le Washington Post a fait tomber Nixon, le Washington Post n’a pas pris le pouvoir ». Si l’on revient aux situations de conflit, notamment l’exemple de l’ex Yougoslavie, d’après plusieurs chercheurs, cette crise a été manipulée fréquemment par la presse, surtout américaine. Dés le début de la crise, les médias américains ont analysé cette guerre comme celle de Serbes perçus comme les seuls responsables des événements dans les Balkans. Avant que la Serbie soit sanctionnée par la communauté internationale, en août 1992, de nombreux articles ont été publiés dans la presse américaine, sur les massacres de Serbes en Bosnie. On citera ici le "Breadline Massacre" (le massacre de la queue de Sarajevo) publié par le premier journal new yorkais, "New York Times".

L’information présentait des dizaines des musulmans tués par une explosion serbe, alors qu’ils attendaient massés devant une boulangerie à Sarajevo. La zone où se trouvait cette boulangerie était sous contrôle strict de troupes bosniaques et une équipe d'investigation de la FORPRONUC a pu enquêter le cas. On a déterminé avec certitude que la bombe avait été placée en face de la boulangerie par les forces bosniaques pour retourner l'opinion publique internationale contre les forces serbes. Le journal londonien "The Independent" a publié un article deux semaines plus tard, décrivant les résultats de l’enquête menée par la FORPRONUC et les implications de cette manipulation qui portait sur "une dizaine d'autres événements pareils, mais à une échelle moins importante". Par la suite, une chaîne de télévision américaine de Washington DC a diffusé un reportage complet trois mois après ces événements, en démasquant la manipulation de l’information. Des sanctions économiques ont été imposées à la Serbie, en août 1992, et d’après Frédéric Echkard, le porte-parole du Secretaire-Géneral de l'ONU pour le département de la presse et de relations publiques- les médias ont eu un impact essentiel sur les négociations ultérieures, dénonçant les sanglants manipulations bosniaques.

Paul Lewis, le directeur du journal New York Times auprès de l'ONU, qui a couvert la crise yougoslave à plusieurs reprises, confirme l'origine de cette bombe placée par les bosniaques et précise: "C'est très difficile de couvrir ce conflit... L'alternative la plus sure est de rester à Sarajevo, pour se protéger des rafales et d'essayer de recevoir l'information de l'ONU et du gouvernement bosniaques (...) La couverture par les journalistes européens risque d’être plus efficace, parce que les français, comme les britanniques et les canadiens ont des troupes sur place, ce qui facilite l'accès aux zones plus difficilement abordables, quand on n'est pas accompagné par des troupes militaires". Ces propos soulignent la difficulté pour les journalistes à être effectivement présents sur les lieux mêmes où ne se déroulent les faits qu’ils rapportent, donc d’en affirmer eux-mêmes la véracité alors qu'ils ne sont pas témoins directs, mais dépendants "d'informateurs institutionnels". En ce qui concerne la couverture médiatique par les médias, ceux ci sont que des petits exemples, pour démontrer la couverture américaine répétitive de la crise yougoslave en reprenant des clichés de "pensée" uni présents, comme le concept de "ethnic cleansing"- lavage ethnique, inauguré par le président Bush, lors d’une conférence en 1991 et utilisé pour décrire constamment un agresseur serbe, comme s’il y avait des crises à "attaquant" unique. Même s'il y a des évidences claires que le "ethnic cleansing" est un "outil" utilisé par toutes les factions, la presse américaine n'a décrit les atrocités des autres parties du conflit pendant plus de trois ans. Et comme le porte-parole du Secrétaire Général de l’ONU l’indique, la couverture des médias a eu un vrai impact sur le procès de négociations...

b) Médias et fossé culturel: Dans cette partie on va choisir d’illustrer la dite "mission d’intérêt public" remplie par l’information lorsqu' elle couvre les conflits armés, à l’image de la guerre du Golfe, au pouvoir de l'opinion publique internationale: au sein de la communauté internationale, qui a les moyens de réaliser et de distribuer l’information. Au sein de cette même communauté, un assemblage d'espaces régionaux distincts; qui s'exprime t'ils de manière universelle? Répondre à ces questions revient à poser "les médias" en tant que moyens d'expression d'un modèle culturel occidental dominant. "L’information, même bien construite, même explicative de l’événement, n’a pas la même signification quand elle est reçue dans des espaces culturelles différents. C’est sans doute cela la plus grande rupture et le problème grave pour l’avenir. L’information n’intéresse pas tout le monde de la même manière d’un bout à l’autre de la planète. Il n’y a pas d’information mondiale car il n’y a pas de citoyen universel..... Une même information n’a pas de signification universelle. Selon les contextes, ou selon les espaces culturels, elle est interprétée différemment.". Cette réflexion de Dominique Wolton nous servira de moteur pour analyser le cadre et les outils par lesquelles le monde contemporain en conflit est affecté dans la lumière des médias, qui sont "devenus, pour des raisons très profondes, un pouvoir sans aucun contrôle, ni contrepoids". (Marcel Gauchet) ou, même plus que ça, l’une des puissances primordiales du nouveau monde contemporain; pour reprendre l’idée du président américain Bill Clinton: "Le nouvel ordre mondial devient un ne bouleux amalgame d’entités multinationales et pouvoirs régionaux émergeants très rapidement, à cause de, premièrement, les nouveaux médias et technologies de communication".

Comment est ce qu’on intègre donc la communication entre l’impérialisme occidental et ces "pouvoirs" régionaux: le monde occidental, "signataire" des "conventions crises" et le "monde en crise"? Comment est ce qu’on communique à tout citoyen concerné les enjeux et l’analyse de ces crises, au milieu de ce "village global" de la communication? Quel est donc le rôle de l’information? Pour une approche mondiale du phénomène de l’information, il est nécessaire d'être conscient que l'espace mondial est constitué de différents espacés régionaux. Pour cette "addition" d'espaces régionaux qui constituent le monde, les critères de différenciation peuvent être: le monde occidental face à la sphère de l'Europe Centrale et de l'Est, le monde asiatique arabo-musulman, l'espace européen et l'espace nord américain, etc. Il y a donc des espaces distincts, selon des critères idéologiques ou culturelles. Face à cela, il existe une information perçue comme mondiale, parce qu sa très haute technicité lui permet une répartition universelle, qui par conséquence couvre tous les espaces sous mentionnés.

Ces moyens technologiques sont notamment les satellites offrant la simultanéité d'une même information sur l'ensemble des points du globe au même moment, ainsi que les supports audiovisuels qui dominent la sphère de l'information moderne. Or, comme le souligne Dominique Wolton, la nature de l'information n'est pas distincte du modèle de la pensée d'une société qui la produit. Chaque type d'information véhicule donc son propre modèle de référence (politique, sociale). Parallèlement, la production de cette information universelle est le fait des sociétés dont les capacités techniques permettent cette production et sa transmission mondiale. Or, ces sociétés sont occidentales et véhiculent donc un modèle de pensée strictement occidental. A l'inverse, l'ensemble des espaces régionaux sous évoqués disposent d'une grille de lecture « spécifiquement régionale » (culturelle ou idéologique) qui n'est pas en accord avec ce model de référence occidental.

Ce hiatus s'avère particulièrement important dans les situations de crise, où le sens donné à la crise sera celui du monde occidental et sera aussi reçu par les autres espaces régionaux, alors même que leur perception spécifique de la crise ne donne pas le même sens à cette crise. Il se pose ainsi un double problème: d’une part, la réalité universelle de l'information n'est que l'universalité de sa transmission, alors même que le sens universel proposé n'est que le sens "crée" par une conception occidentale; d'autre part, l'expression d'autres sens, que sont les points de vues régionaux de cette même crise n'ont pas les mêmes moyens technologiques d'expression et de distribution dans et lors de leurs propre contexte régional. Il s'ensuit donc un écrasement des divers "sens" régionaux au profit d'un seul "sens régional" aussi, qui est le sens occidental, alors même qu'une démarche démocratique de confrontation des points de vue nécessiterait une égalité de ces points de vue.

Ainsi, l'impérialisme "technologique" de l'Occident est assimilé à un impérialisme idéologique et invite les populations non occidentales à accentuer la conscience de leur singularisation. Dans le même temps, les sociétés occidentales ne disposant que d’un mode dominant de perception resteront enfermé dans ses propres limites de pensée.

"Il y a donc, effectivement dans le développement d'un mode d'information de ce type, un accroissement des déséquilibres et des rancoeurs et même d’éloignement des points de vue" (D. Wolton) au point qu'elles deviennent ainsi l'inverse de sa vocation universelle de rapprochement de points de vue pour arriver à une accentuation de leurs opposition. C'est en cela qu'il y a donc rupture dans la vocation universelle de l'information et problème grave pour l'avenir, car "il n' y a pas de citoyen universel" et donc il n' y a pas une signification universelle.c) La communication comme facteur d’intégration sociale: Restituer les médias au sein de leur propre société, en analysant les limites de leur "rôle informatif", permet de mentionner un constat sévère quant au dévoilement de l'information "telle qu'on l’entend de manière communément admise: "un simple compte rendu des événements".
L’information, on vient de le voir, peut-elle en conscience, remplir un rôle d'acteur, être manipulée elle-même, voire, être manipulatrice à son tour? Une analyse, en "cercles concentriques" de plus en plus large, permet d'énumérer les conséquences d'un tel dévoiement par rapport à "sa mission originelle". "A qui profite le crime,", ironise-t-on dans le constat d'une information si mêlée dans les finalités économico politiques de sociétés qui la portent, au point qu'elle en constitue l'un des plus importants vecteurs d'intégration sociale. Si ce constat, émanant des politologues, rassure tout autant qu'il effraie, il est aussi le moyen d'offrir à "l’opinion publique" une réelle réflexion sur la qualité de son information et par là, d'inciter fermement les médias à remplir effectivement un "rôle" de "contre-pouvoir", rendu d'autant plus nécessaire, à la lumière de ce constat.

d) Médias acteurs: Il existe donc un ensemble de recherches portant sur la vocation universelle de l'information, avec le constat d'une distribution effectivement mondiale, mais d'un "sens" exclusivement occidental de cette information, constituant ainsi l'expression d'un simple point de vue "régional" parmi d'autres mais écrasant les autres, avec le sentiment de subir "l'impérialisme occidental" de l'information, au travers de la domination technologique produite par celui-ci.

Plus largement, ces recherches portent ensuite sur la réalité de cet "impérialisme occidental" de l'information, en tant que simple état de fait, résultant de la domination technologique sus évoqué ou réelle, volonté d'un système économique et politique d'établir en fonction d’autres systèmes régionaux une relation de dominant dominé à son profit- remplissant alors un rôle de plus en plus éloigné du simple "véhicule d'information neutre" que l'opinion publique occidentale lui prête communément. Or, l'évolution de ce rôle les conduisent-ils à être l'instrument du réel impérialisme et plus loin le partenaire complice et conscient de cette démarche, car ils sont déjà le véhicule d'une information subjective, puisque par là les médias deviennent un "acteur " identifiable, aux cotés de ces événements. "L'engagement" de cet acteur a déjà les répercutions notables sus évoquées, d'exacerbation ou radicalisation des identités régionales respectives, concernés par les événements et il s’agit bien là de l'illustration du passage des "medias-vehicule" aux "medias acteurs". Le rôle des "medias acteurs", partie prenante des événements cités par l'information, est alors illustré par bien des conflits depuis 1990, par exemple, où ils sont intervenus dans "la média diplomatie" de la guerre du Golfe, terme crée tout exprès pour souligner leur influence sur le déroulement des opérations antérieures au conflit armé lui-même. Cette influence constitue bien une " action " orientée, qui bien que "vertueuse" et réelle est distincte d'un stricte rôle de "compte-rendu informationnel" des événements. Mais ces "médias acteurs" passent au stade de "medias manipulés" dans leur "action", lors des événements de la ex Yougoslavie, où par exemple, le Général Dovillon, militaire "médiatisé" n' hésitait pas à répéter son "besoin des journalistes" et d'une couverture médiatique d'importance susceptible de mobiliser "l'opinion publique internationale", afin que des mesures politiques conséquentes puissent être adoptées concernant Sarajevo; On peut aussi citer François Leotard, Ministre de la Défense, déclarant "C'est vous Messieurs les journalistes qui sauverez Sarajevo, grâce à vos excellentes émissions". Les médias, en se prêtant à cette "démarche" vertueuse", là encore acceptent de substituer à leur rôle informatif un rôle publique de lobbying en faveur de la paix, donc être acteur engagé dans l'événement et "manipulé par l'une de parties en présence, dans un but humanitaire, alors même que la sphère politique seule, à savoir les dirigeants et leurs citoyens, avaient à se positionner dans un rapport de force tel qu'il engendre la "pression politique" nécessaire à une réelle mobilisation internationale en faveur de Sarajevo. Cette logique des médias, tolérée par l'humanitaire inverse leur rôle de "porte-parole de l'opinion publique" en un rôle de "manipulateur volontaire" de celle-ci, au profit "bonnes causes" (Golfe, Yougoslavie) qui créent néanmoins les précédents nécessaires à d'autres interventions de même nature, sur d'autre causes dont on se demande qui s'arrogera le droit de décréter leur valeur intrinsèque. Au niveau médiatique, soulignons seulement les propos de Patrick Poivre d'Arvor "Ce qu'on a fait dans le journal T.V. de TF1 contribue à faire bouffer des événements: pour la Somalie, grâce à Kouchner, notre travail a aboutit à l'opération " sac de riz" et la famine est disparue", mais aussi Laurent Joffrin, rédacteur à Libération: "Nos journalistes ont été les instruments de la victoire du Capitalisme dans la gauche" (sic) (cf: Serge Halimi) pour illustrer la précaution à cette évolution des médias d'un rôle "d'acteur manipulé" à un autre de "manipulateur volontaire". Le comportement des médias est peu susceptible être "inconscient" et le passage d'un rôle de "manipulé volontaire" à un rôle de "désinformateur volontaire" ne peut être admis que si, outre le constat fait par Marc Ferro dans le cas d’une démarche de facilité" professionnelle, consistant à préférer systématiquement les "vérités" déjà admises, ce qui permet des "informations non informées", car "il n'y a pas d'information sans point de vue de l’information". On y ajoute le témoignage des journalistes eux-mêmes, évoquant Serge Halimi, qui dénonce "un journalisme de révérence", en évoquant les collusions entre journalistes et pouvoirs politiques et économiques, et l'analyse des politologues parmi lesquels Maurice Duverger, signalant "la règle fondamentale des médias (...) éviter les pouvoirs controversées et dangereuses (...) et défendre les valeurs traditionnelles et le systèmes établis (...), les système d'information aboutissant à une "crétinisation" du public(...) pour le détourner des vraies problèmes". Serge Halimi, parlant du rôle supposé de "contre-pouvoir" prêté aux médias, évoque "l'effronterie de cette société de connivence" aux "idées uniformes et déchiffreurs identiques" qui "se fréquentent, s'apprécient, s'entreglossent". On peut aussi citer Noam Chomsky, pour dénoncer "l'imbrication constante entre les groupes industrielles et les médias" et "la réalité des rapports inscentueux entre médias et pouvoirs politiques: "Comment l'élite contrôle t'elle les médias? (...) elle n’a pas a les contrôler (...) ça lui appartient. Et "les essayistes de la pensée unique" qui sont les "grands journalistes au bourdonnement satisfait" autorisant "l'omniprésence de quelques intellectuels en phase avec l'air du temps" aboutit à une définition des journalistes, là pour donner une image lisse du monde "avec une volonté de conditionner les citoyens".

Pourtant, cette même volonté, qui, pour Maurice Duverger pose "le public en victime"très peu préparé á remplir ses devoirs de citoyen (...) et objectivement, l’information dans les régimes libéraux tend au résultat dénoncé par les régimes communistes: faire oublier aux masses l’exploitation, puis elles subissent, et stériliser leurs volonté de révolte". Maurice Duverger signale que c’est "un mécanisme, naissant d’un processus strictement économique, qui tend au même résultat de conditionnement des opinions publiques que dans les sociétés totalitaires". L’analyse du dévoilement de l’information n’exige en général, dans les pays développés nul recours á la théorie du complot"(en usage dans les sociétés totalitaires). ( Noam Chomsky)

Mais le résultat est bien identique et l’exemple du groupe "Ruder-Finn", société internationale à vocation de lobbying permet d’illustrer la manière dont, les intérêts strictement politiques sont "gérés" par des unités économiques, au même titre que d’autres "biens de consommation", au sein de la société occidentale. En 1991, juste á l’issue de la crise yougoslave, le nouveau gouvernement croate, ainsi que la diaspora croate aux Etats Unies, a engagé la société de relations publiques "Ruder-Finn" pour présenter à l’opinion publique internationale (premièrement américaine) le point de vue croate sur la crise en train de démarrer. Malgré l’opposition de plusieurs pays européens, la communauté internationale a fini par "signer" l'indépendance de la Croatie, aux pressions de l’Allemagne et de l’Autriche, anciens alliés et partenaires de la Croatie. Ceci fut un moment longuement disputé par Lord Owen et les "négociateurs de paix"européens qui, par une analyse socio-historique avaient compris

l’immaturité d’une telle indépendance. Initialement, la Croatie s’est fait connue à Washington par les rapports publiés par les agents de "Ruder-Finn", ce qui a donné une certaine nuance de compréhension de la crise yougoslave. "Cette compréhension risque de dénaturer les prises de décisions du gouvernement américain vis-à-vis de la crise." (Alexandra Banic).

L’illustration de ce lobbying politique, effectué au travers des médias dans une finalité "informative" réelle est très éloignée de la "vocation objective" des médias á présenter les divers aspects d’une crise avec "neutralité" vis-à-vis de ses parties prenantes. Cela souligne bien le "mécanisme strictement économique" évoqué par Maurice Duverger, mais aboutissant au "dévoilement de l ‘information (...) sans recours à la théorie du conflit" (Noam Chomsky) et qui renvoie dos à dos les médias des pays occidentaux et ceux de pays totalitaires. En dehors de ces rôles d’interventions « volontaires »dans les crises, les médias ont prouvé avoir été aussi des acteurs aux fonctions collectives positives lors de certains conflits. Si l’on étudie le cas du renversement du gouvernement totalitaire de Ceausescu en Roumanie, la radio, lors de cette crise, a eu un rôle primordial pour rejoindre les masses à la « révolution ». Dès que la crise a débuté dans la ville de Timisoara, la chaîne de Radio « Europe Libre » a transmis toutes les 15 minutes le message alarmant de cette femme qui a été presque exécutée dans le marché central. Ce message très « viscéral » a invité une grande partie de la population bucarestoise à essayer joindre la ville de Timisoara. Les gares ont été désormais fermées, ce qui a fait que la population est descendue dans les rues de Bucarest même... C’était le début des événements de décembre, 1989...

Ce cas prouve le rôle des médias à emmener les populations ensemble et à les rejoindre dans leur quête à trouver des solutions aux respectifs conflits. Ne pourrait’on créer plusieurs tels postes de radio pour inviter les populations à la paix?

Si l’on se resitue dans la crise de la ex Yougoslavie, quel effet aurait eu un tel poste de radio à Sarajevo, pour expliquer à la population les étapes successives du conflit?

Même si cette stratégie pourrait être considérée comme de l’intoxication, ne serrait’elle une façon possible de prévention de crises?B: L’intervention de la Communauté Internationale: La démarche de la communauté internationale, notamment celle des Nations Unies a été premièrement la prévention. Dans son Agenda pour la paix* (1992) comme dans son rapport Agenda pour le développement (1994), le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies souligne le rôle crucial des actions de prévention et des activités à long terme dans la consolidation de la paix.

A l’heure actuelle, toutefois, la plus grosse part des ressources et des efforts est investie dans des missions de maintien de paix et humanitaires. Les problèmes urgents éclipsent ceux qui sont les plus importants à long terme, et il ne reste plus de temps pour corriger, avec clairvoyance l’actuelle inefficacité des stratégies de développement et on observe une impuissance à agir de façon cohérente en matière de renforcement des capacités endogènes. La solution réside dans la prévention. Or, souvent, quand elle porte ses fruits, la prévention passe inaperçue. La société ne réagit plus qu’aux ../images les plus spectaculaires, les plus criantes, voire les plus pathétiques qui s’affichent sur les écrans de télévision. La prévention suppose que le regard se porte sur un horizon autorisant une vision à long terme. Passer du maintien de la paix à la consolidation de la paix exige une nouvelle perception centrée, avec l’aide des médias, sur l’avenir intangible. Cette perception doit être défendue par les décideurs, les parlements et surtout par l’ensemble de la société civile. Une telle prise de conscience permettrait à une nouvelle vision de s’affirmer peu à peu pour faire face avec imagination aux menaces qui pèsent sur la sécurité du monde.

Dans son rapport « Agenda pour la paix »*, le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies distingue quatre domaines d’action: la diplomatie préventive, action qui a pour objet d’éviter que des différends ne surgissent entre les parties, d’empêcher qu’un différend existant ne se transforme en conflit ouvert, et si un conflit éclate, de faire en sorte qu’il s’étende le moins possible; le rétablissement de la paix, action qui vise à rapprocher des parties hostiles; le maintien de la paix, action qui consiste à établir une présence des Nations Unies sur le terrain, ce qui n’a jusqu’à présent été fait qu’avec l’assentiment de toutes les parties concernées et s’est normalement traduit par un déploiement d’effectifs militaires et/ou de police des Nations Unies ainsi, dans bien des cas, que de personnel civil et la consolidation de la paix après les conflits, action menée en vue de définir et d’étayer les structures propres à raffermir la paix, afin d'éviter une reprise des hostilités. La position de l’Unesco: La quête de la paix a été la motivation initiale de la création de l’Unesco, à l’issue de la deuxième guerre mondiale. L’acte constitutif indique que « Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix. ». Depuis quelques années, la fin de la guerre froide et la multiplication des violences liées aux conflits ethniques et culturels ainsi que l’aggravation des inégalités socio-économiques dans beaucoup de régions du monde ont incité l’Unesco, de même que d’autres institutions du système des Nations Unies, à contribuer à la recherche de solutions permettant de résorber d’urgence les situations pré conflictuelles, conflictuelles et post conflictuelles. Le programme d’action de l’Unesco pour une culture de paix, dont la phase initiale couvre la période de 1994 à 1995, vise apporter une contribution importante à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix après leur achèvement dans le contexte de l’Agenda pour la paix ». Par exemple, dans le passage où est décrite la consolidation de la paix après les conflits, il est fait mention du soutien des efforts de protection des droits de l’homme, de la reforme ou « du renforcement des institutions gouvernementales et de la promotion des processus, formels ou informels, de participation politique »et « ainsi que de la réduction des sentiments d’animosité au moyen d’échanges d’étudiants et d’enseignants ou de réformes des programmes scolaires ». (* Programme d’action pour promouvoir une culture de paix, UNESCO, 9 Septembre, 1993) Ce programme devra élaborer sur une base multidisciplinaire intégrée, des approches qui engloberont tous les domaines de compétence de l’Unesco:

a). Concernant la prévention des conflits, « dans chaque pays, des stratégies devraient être adoptées en vue de mener des campagnes d’éducation populaire, d’utiliser les médias au service de la paix et d’introduire, dans les écoles, des programmes axés sur la paix et la démocratie ».*

Outre son action en profondeur pour la prévention à long terme des conflits, l’Unesco est aujourd’hui appelée à intervenir d’urgence dans de nombreuses situations pré conflictuelles. Dans le cadre du programme visant à promouvoir une culture de paix, les activités suivantes ont été prévues et effectués partialement dans la période 1994-1995:« - mobilisation des faiseurs d’opinion (intellectuels, artistes, éducateurs, journalistes, spécialistes, etc.) au niveau des différents parties prenantes à une situation de conflit croissant, en sollicitant leurs avis et leur concours pour trouver une solution à celui ci.- renforcement de la société civile en favorisant des structures politiques consensuelles afin de permettre la participation des minorités au processus politique.- appui aux médias indépendants et utilisation des médias en faveur de la paix et de la coopération afin de calmer le jeu en contrebalançant les effets de la propagande- action éducative et culturelle en faveur des réfugiés, des populations nomades et autochtones et des minorités.- contribution à l’élaboration d’un système d’alerte rapide des Nations Unies en matière de violence sociale, et notamment à l’établissement d’indicateurs permettant de surveiller le respect des droits culturels.- appui à des programmes de recherche sur des situations pré conflictuelles afin de définir les besoins fondamentaux des groupes vulnérables et marginalisés ainsi que d’identifier les traditions de dialogue et les expériences historiques de solution des conflits et études prospectives susceptibles de fournir les fondements d’une vision interculturelle convergente de l’avenir. »*

b). En situation de conflit ouvert, les missions de l’Unesco, associée à l’ONU, peuvent englober « la création de structures éducatives provisoires afin d’assurer la continuité des services éducatifs dispensés aux victimes de conflits, un soutien à l’indépendance des médias, l’organisation de réunions de faiseurs d’opinion afin de définir des espaces de compréhension mutuelles susceptibles de faciliter des accords de paix et des interventions visant à protéger les biens culturels menacés par la guerre, dans le cadre de la Convention de la Haie (1954) »*.c) La consolidation de la paix après un conflit constitue une tâche particulièrement difficile parce qu’il faut contribuer à « rebâtir les infrastructures sociales détruites par la guerre et à inciter des populations marquées par leurs dissensions à se réconcilier et concourir à créer des conditions permettant le retour et la réinsertion des réfugiés ».* Cette tâche est particulièrement urgente lors de la première phase de consolidation de la paix, où les accords de paix risquent d’être violés et où le pays court le danger de retomber dans la violence. Dans cette optique, des programmes nationaux sont déjà mis en oeuvre au Salvador et en Mozambique et d’autres sont en cours d’élaboration au Burundi, Congo, Guatemala et Nicaragua. Il convient de mentionner le programme d’ El Salvador, qui couvre plusieurs secteurs de l’éducation nationale, ainsi que de l’appui aux radios qui offrent des services d’information et d’éducation non formelle aux femmes démunies victimes du conflit, aussi que des services éducatifs et psychosociaux de remplacement à l’intention des enfants victimes du conflit armé, etc. (voire le programme relatif à El Salvador). Aussi, plusieurs projets de communication ont été récemment établis dans certains pays pour contribuer directement à une culture de paix. Ainsi, au Rwanda, où la station de radio « Mille Collines » qui avait transmis la propagande de violence pendant le génocide de 1994 (500, 000 victimes), l’Unesco, en coopération avec « Reporters sans Frontières »a aidé à l’inauguration de la radio Gatashya, qui signifie littéralement « la rafale qui emmène les bonnes nouvelles ». La radio, qui émet depuis août 1994, aide les réfugiés ruandais des pays voisins avec de l’information éducationnelle et concernant la distribution des vivres, de l’eau et de médicaments.d) Le programme de recherche postérieure aux conflits: L’Unesco étant la seule organisation du système des Nations Unies dont les fonctions englobent la promotion de la recherche en sciences sociales, « s’engage à financer à l’intention de pays engagés dans une phase de consolidation de la paix après un conflit, un programme de recherche portant sur les causes sociales, économiques, politiques et culturelles du conflit et les moyens de remédier à ces causes et à`leurs effets négatifs, le processus des accords de paix et leur mise en oeuvre, afin de cerner les aspects à renforcer et les obstacles à surmonter, l’édification d’institutions démocratiques, la mobilisation des divers secteurs de la société en faveur du processus de paix, les problèmes de marginalisation de certains groupes, les populations autochtones ou les nomades, par exemple et la manière dont leurs besoins peuvent être pris en compte et satisfaits dans le cadre de l’application du processus de paix et la contribution spéciale que les grandes traditions religieuses et éthiques de la planète et de la force morale qu’elles représentent pourraient apporter à la paix. »* Bien évidement, ces actions seront toutes extrêmement utiles pour les systèmes d’alerte rapide et pour la consolidation de la paix avant que n’éclate un conflit. C: L'Education: l’apprentissage global, l’histoire et l‘ historiographie : Dans cette partie, on va analyser en particulier la façon dont on peut organiser une culture de paix autour de l’éducation.

a) L’apprentissage global est une des lignes directrices qui se manifestent à présent dans les discours pédagogiques internationaux. Peut-il contribuer à une culture mondiale de la paix? Une culture de la paix ne résulte pas d’une proximité familière qui entre en ligne de compte dans le concept du « village global ». Elle est plutôt partie intégrante du débat mondial actuel sur « l'hégémonie culturelle » (Gramsci), pour qui Marx est toujours d’actualité et selon laquelle « les pensées dominantes sont les pensées des dominants ».

Dans cette optique, on peut considérer quatre champs d’orientation, concernés par la lutte en faveur de l'hégémonie culturelle. Il est nécessaire de les citer rapidement étant donné qu’on peut y reconnaître la base sur laquelle est fondée « la globalité » en tant que partie d’une culture de la paix. Ils apparaissent ici sous forme de dichotomies, bien qu’en réalité il s’agisse de rapports de tension dont l'équilibre intérieur n’est jamais stable mais uniquement l’objet de débats autour d’une hégémonie culturelle.- « Le droit naturel du plus fort » vs. « Justice pour tous » (les êtres humains et l’ensemble des créatures).

- « Réduction » vs. « Complexité »
- «Culturalisme » vs. « Universalisme »
- « Externalisme » vs »déontologie » « La globalité » vise avant tout les points d’orientation suivants: la justice pour tous, la complexité, l’universalisme et la déontologie. Entre ces points d’orientation, il existe un rapport réciproque. Ainsi, « la justice pour tous » n’est pas possible si en même temps on ne tient pas compte et si l’on ne respecte pas « la complexité » (des systèmes culturels) d'après la devise « Unité et diversité » (Buhler, 1994) Parallèlement, il existe un rapport de tension considérable parmi les dichotomies et entre celles-ci même, qui augmentent aussi bien pour chaque individu qu’entre les différentes sociétés. On se plaint de plus en plus de la montée du fondamentalisme, du tribalisme ou bien du chauvinisme régional dont la conséquence serait une surenchère de violence. L’analyse qui a été faite n’est pas assez approfondie, car au terme du conflit est-ouest, par exemple, la paix qui aurait dû en découler ne s’est pas installée, étant donné que chacun porte en soi un potentiel de fondamentalisme individuel. Sûrement, la « globalité » en temps qu’objectif ne peut pas être uniquement imposée par des pédagogues. Elle dépend de la bonne volonté de tous ceux qui croient en la bonté de l’homme quelle que soit sa culture. Et ils sont plus nombreux que l’on ne pourrait le croire, car dans tous les coins du monde apparaissent des mouvements en faveur de la paix, de l'écologie, des droits de l’homme, etc. Hans Buhler définît le concept de « globalité » comme un principe didactique dans le triple sens du mot:
- Globalité en tant que « mode de connaissance globale », concevant que la pensée déterministe et isolée n’est qu’une partie de la pensée collective - quand bien même importante.- Globalité en tant que « mode d'apprentissage global » qui permet de trouver un équilibre entre l’apprentissage cognitif-unilateral et fortement accentué - et l’apprentissage émotionnel et social. L’apprentissage « intégral » ou l’apprentissage « holistique » est proche du monde d’apprentissage global. Ce concept fondé au niveau des théories de l’apprentissage, par exemple pour l’apprentissage intégral renforce en outre encore davantage la richesse interculturelle des divers modes d’apprentissage global au niveau de différentes cultures. (On trouve des indications chez Nyoyo, dans le contexte africain, 1992. En outre, il renvoie a Krishnamutti, qui montre des parallèles aux Indes). On se rend compte de ces différences, en comparant les expériences primaires faites par les enfants européens et celles des enfants africains qui exploitent très soigneusement leur propre champ de mais. Outre l’endurance physique, ils doivent faire preuve de savoir et d'expérience en matière d'écologie et de biologie et savoir planifier leur travail. Ils participent ainsi à l'alimentation de l’ensemble de la famille, ce qui leur permet d’assumer leur responsabilité sociale envers celle-ci. Inversement, ces expériences primaires ne sont pas seulement l’acquisition de compétences vues sous un angle romanesque, mais peuvent parfois être des moyens impitoyables de survie. D’autre part, ces moyens ne permettent qu’à peu d’enfants africains d’élargir leur horizon dans le secteur secondaire comme c’est le cas pour les enfants du même âge du Nord privilégié.- Globalité entendue comme « responsabilité globale » qui conçoit le globe en tant que « Oikos », accessible équitablement à tous les êtres humains, qui, en retour ont le devoir de le manipuler avec un soin scrupuleux: « un développement efficace » est sans doute actuellement le concept qui exprime mieux ces aspirations. Le mode de connaissance globale, le mode d’apprentissage global et la responsabilité globale sont trois perspectives de globalité qui sont interdépendantes et ne se justifient que par une explication méthodique. Pour l’apprentissage global, elles sont constitutives à part égale, ainsi doivent-elles toujours être perceptibles pour tous ceux qui sont dans le processus d’apprentissage. L’échange global est un thème de base de l’histoire de l’humanité que ce soit au niveau économique, scientifique ou culturel. Probablement, ni les pédagogues, ni les théologiens ont contribué tant à la compréhension parmi les différentes cultures que les commerçants. Néanmoins, dans la lignée de la tradition occidentale, la culture a toujours été depuis Kant et Rousseau comprise comme culture universelle, donc de toute l’humanité. Si l’on observe les grands pédagogues de notre siècle, comme P. Freire, C. Freinet, M. Ghandi ou J. Nyerere, on constate que ces dernières s’adressaient à tous les hommes et à l’homme entier. Le « concept d’apprentissage global » se situe donc dans la tradition des lumières comme dans celle de la pédagogie de libération.

Depuis la fin officielle du colonialisme, des systèmes scolaires, sans précèdent dans l’histoire de l’humanité, surtout dans l’Afrique au sud du Sahara, se sont répandus dans le monde. Ainsi, sont apparus des dispositifs d’organisation scolaire qui sont une condition essentielle pour réaliser « l’apprentissage global » car « l’apprentissage global est un processus à long terme qui dépend de la stabilité et de la continuité d’institutions comme « l’école ». (Voir à ce sujet l’Afrique au sud du Sahara; World Bank, 1988, p.15) Mais si l’on considère cependant l’état actuel, on s’aperçoit que bon nombre de pays pauvres ne sont plus en mesure de maintenir ces dispositifs en place, que ce soit au niveau du fonctionnement ou au niveau pédagogique (Unesco, 1991) et de plus en plus de parents et d’élèves doutent de l'efficacité de l’éducation scolaire. Promouvoir l’éducation n’est pas seulement une investissement très rentable - encore faut’il qu’elle soit équilibrée socialement - avec un important « rates of return »; elle est avant tout une des conditions essentielles pour donner naissance à une culture de paix. Aujourd’hui, les migrations mondiales n'entraînent pas seulement un regain de violence de la part de nombreux autochtones vis à vis des nouveaux venus, mais aussi une diversité d’actions très hétérogènes et créatives qui ont pour devise de « penser globalement, et d'agir localement ». Hans Buhler considère qu’il y a deux secteurs très importants qui doivent être pris en considération quant à « l’apprentissage global ».

D’après lui, le mode de connaissance globale exige un élargissement de formes de pensée qui devraient être exercées en priorité dans les écoles. Par exemple, on peut nommer la forme de pensée complémentaire pensée inclusive par transition à la pensée exclusive qui domine dans les écoles. Cela signifie que les individus qui pensent dans la tradition des lumières et dans celle de l’industrialisation et de l’image du monde qui leur est liée comprennent le monde en tant que champ d’action; pour eux, l’action de rationalisation utilitaire est devenue une valeur individuelle. Le fonctionnement de cette action est très compliquée, néanmoins il faut réduire la complexité autant que possible afin de pouvoir en arriver à l'opération logique du « ou bien... ou bien », ce qui est utile dans certaines situations quotidiennes peu complexes parce que cela est rassurant.

Depuis que l’humanité est menacée d’autodestruction en raison de son comportement écologique insensé et de son refus d’en assumer les conséquences, nous savons que le fait de réfléchir, de comprendre et d’ajourner nos actions est une chose, mais que d'éviter le mal est préférable que de vouloir le bien est une autre. Il serait donc nécessaire dans l’apprentissage global d’attribuer de nouveau plus de valeur à une forme de pensée qui se retrouverait au niveau de toutes les cultures, une valeur primaire dans celles qui sont les moins industrialisées et une valeur secondaire dans celles qui le sont le plus et que Buhler appelle pensée inclusive. Les termes « Aussi bien ...que » (et la conjonction « et ») font partie en tant qu’opération logique de la pensée inclusive. Celle ci est nécessaire pour la bonne compréhension d’implications, mais elle est également valable dans des situations très complexes ou angoissantes lorsqu’on ne peut ou lorsqu’on ne veut pas se décider pour une option, mais pour plus de sécurité disposer de plusieurs solutions. Par exemple, actuellement plus en plus de personnes malades se font soigner en même temps au moyen de la médecine traditionnelle et de la médecine parallèle, option utilisée assez souvent par les cambodgiens, qui souvent se font soigner par un guérisseur et en même temps à l’hopital-dans la mesure où ils en ont les moyens financiers. La pensée inclusive n’est pas identique avec la « conjonction » bien connue de la logique formelle classique, car il ne s’agit pas d’un énoncé statique d’arguments ou de combinaisons dans un système déterminé, mais d’un processus de développement de la compréhension qui en principe et parfois même en pratique ne peut être achevée. L’incertitude n’est pas réduite par la pensée inclusive, mais elle devient consciente, et donc pre-structurée. Cette façon de penser est courante en Europe de l’Est où, très souvent l’on emploie l’expression « on va trouver une solution » et qui est exactement utilisée lorsque la complexité n’a pas encore été perçue, d'où l'impossibilité d’assumer consciemment ses responsabilités, par conséquent attendre est alors la meilleure alternative. On retrouve également cette forme de pensée dans le proverbe chinois suivant: « Si tu es pressé, fais un détour ». Peut-être, trouvera-t-on dans certaines traditions culturelles traditionnelles balkaniques, asiatiques ou indiennes la richesse de telles formes qui seront primordiales pour le développement d’un concept global. Enfin, l’apprentissage global a besoin d’un consensus visant les contenus communs qui doivent apparaître sous différentes formes dans toutes les écoles, au niveau de tous les médias, partis, et syndicats. Il est intéressant de constater que dans la plupart des écoles, il existe un important consensus dont les contenus signifient « école », par exemple, l’introduction des outils de la culture: lire, écrire, calculer, dans les écoles primaires, l’introduction d’une ou plusieurs langues étrangères, l’introduction du cours d’histoire nationale*, celui de sciences naturelles, de mathématiques, mais aussi de cours orientés vers la géographie et vers l’histoire du monde dans les écoles secondaires. Ces contenus très répandus ne doivent être bannis des écoles par l’introduction de l’apprentissage global. Ils doivent cependant être complétés par l’apprentissage global afin de renforcer l’espoir d’une culture commune de paix. Le pédagogue allemand W. Klafki (1993) a présenté un concept dans lequel on peut identifier les sept problemes-clef du monde d’aujourd’hui en tant que caractéristiques fondamentales de l’éducation internationale », qui sont des contenus importants pour l’apprentissage global:

1. Guerre et paix
2. « Sens et problématique du principe de la nationalité » et particularité de la culture et de l’inter culturalisme
3. Questions écologiques
4. Croissance de la population mondiale
5. Inégalité de la société a l'intérieur de celle-ci et entre les différentes sociétés
6. Dangers et possibilités des nouveaux procédés d’information et de communication
7. Subjectivité de chacun, rapport entre moi et toi. Pour conclure, il n’est pas raisonnable, ni possible de formuler un curriculum pour l’apprentissage global valable universellement, car il ne faut pas que la diversité culturelle soit sacrifiée à un concept de globalité, même si l’intention est bonne. D'après Michel Wieviorka, « la globalisation détruit certains cadres nationaux. On ouvre la voie à la démultiplication des identités. » (novembre 1995, cours « Sociologie du conflit », EHESS). Ou, l’on peut aussi se demander si l’apprentissage global n'accélère-t-il pas à l'échelle mondiale d’une façon dont on ne peut répondre les tendances à l'uniformité et par conséquent, contrairement à la bonne intention de vouloir être une contribution à une culture de paix - n’est ce pas un pas de plus vers la destruction de la diversité culturelle et par conséquent sans doute une menace de plus pour l’humanité entière?Peut être faut-il entreprendre des actions à différents niveaux qui peuvent ouvrir l’esprit en faveur de plus de globalité, en commençant par des forums, allant des campagnes de presse jusqu’aux programmes de jumelage régionales entre les écoles du monde entier.

b) L’enseignement de l’histoire: curriculum réel vs. curriculum truqué: L’éducation, déclarée comme un droit fondamental de l’homme doit avoir comme but l’enseignement réel de l’histoire dans les pays affectés par des conflits, pour une compréhension nécessaire des sources de ces conflits, enseignement qui devra incorporer dans son cursus une rénovation systématique du curriculum pour ainsi présenter une approche ethnique, raciale réelle, ainsi que les différences raciales et culturelles soulignant l'égalité entre ces ethnies et races. Dans ce contexte, il est nécessaire d’analyser l’organisation et la modification du curriculum, l’évolution du corps enseignant, de ses conditions d’exercice, éléments qui ont varié selon les contextes politiques et historiques, des contextes qui ont connu des projets politiques et éducatifs différents avec des publics et des conditions d’enseignement très diversifiées face à des savoirs savants qui ne sont toujours pas stabilisés.

Dans quelques cas à étudier (français, roumain, anglais), la science historique et l’enseignement de l’histoire sont passés de savoirs positifs et du postulat de leur universalisme à leur remise en cause par la diffusion de la culture critique liée a une approche scientifique dominée par le relativisme:L’exemple de l’historiographie: Si on prend l’exemple français, «l' Ecole des Annales » crée en 1929 utilise une approche relativiste dont le but est « former la nation ». La mémoire et l’histoire font preuve d’une vision successive, une configuration nouvelle, mais pas forcement stabilisée. c) Des savoirs positifs aux savoirs incertains: Le statut de savoirs scolaires a évolué d’un état incontesté à un état d'incertitude.

En France, en 1964, avec Bourdieu, la sélection scolaire, la mise en cause des savoirs touche l’enseignement de l’histoire constituée à partir d’un tissage serré entre le projet politique qui a motivé son institutionnalisation, sa création en temps qu’institutionnalisation.

La chronologie utilisée a été celle de la construction de l’état nation: Son objectif était de rendre la nouvelle génération membre de cette collectivité: (Lavisse, Histoire de la Nation Française). Pour analyser le passage de savoirs scolaires construits de l’histoire de l’enseignement à la sociologie du curriculum on va citer E. Durkheim, qui dans son ouvrage « L’éducation morale » parle de programmes et idéaux pédagogiques des faits sociaux datés: l’existence est étroitement liée aux évolutions sociales. En 1977, André CHERVEL parle d’une homogénéité culturelle, de la relative autonomie d’une discipline scolaire par rapport aux savoirs savants: disciplines scolaires, finalités assignées; conception et contennus.Comment ça se distille dans l’enseignement? D’après lui, « Il faut poser devant les futurs professeurs le problème de la culture secondaire dans sa totalité ». La sociologie critique développée en France dans les années ‘60 et ‘70 développe l’idée que les contenus des enseignements des moyens ont été trouvés par la bourgeoisie pour inculquer à une classe d’âge la culture dominante (Bourdieu 1966) et pour assurer le maintien des inégalités sociales. Dans la même période, en Grande Bretagne, une nouvelle sociologie de l’éducation sera développée: le curriculum à partir d’une définition qui privilégie l’idée de programmation, d’organisation méthodique et d’objectifs définies par opposition au curriculum prescrit; identifie un curriculum caché, en rapport lointain avec le premier. (Forquin: Ecole et Culture-Le point de vue des sociologues britanniques).d) Les mutations du savoir dans une société critique: (voire sociétés type soviétiques) Suivant l’approche relativiste française de « former la nation », on va analyser l’exemple roumain , où pendant la même période de l’Ecole des Annales en France, Nicolae Iorga, le père de l'historiographie roumaine avait aussi comme centre idéologique le mythe de la nation. Les idées qui marquent son ouvrage, on pourrait même dire qui l'obsèdent, sont liées à sa recherche continue de placer les roumains dans l'histoire universelle, par rapport à ces circonstances, qu'il a dénommées par une exagération voulue "les permanences de l'histoire". Nicolae Iorga a considéré comme obligatoire l'étude du cadre universel de l'histoire nationale. L'idée de la latinité des roumains, ainsi que l'époque byzantine, ont été pour Iui, durant toute sa vie, la meilleure voie et la plus profonde pour la compréhension du sens de l'histoire et de la nation roumaine. Pour faire sentir la latinité du peuple roumain, Iorga a écrit parmi d'autres ouvrages, une histoire importante sur "l'idée Romaine de Frontières". C'est un chapitre d'histoire de la pensée qui ouvre une enquête sur le nom de la Roumanie dans ses rapports avec l'idée des frontières romaines. L'élément central pour décrire "la Roumanie dans l'Europe Moyenne" c'est le Danube d'Auguste, une base de commandement dans la romanisation du monde, qui devient pour Iorga un "Danube d'Empire" et non pas une frontière. En tant qu'historien de Byzance, c'est cet empire qui a été pour Iorga la meilleure voie et la plus profonde pour la compréhension de la nation roumaine et de son sens historique. Son mythe de la nation est exprimé dans son oeuvre avec une plasticité exceptionnelle: la civilisation humaine, d'après lui, est l'Occident et l'Orient, dont Byzance, a réussi à son avis, la synthèse. La nation roumaine a comme base profonde l'esprit byzantin. "L'Occident, dit-il, se caractérise par la possibilité du mouvement spontané de la production toujours nouvelle de la vie des nations. L'Orient représente "quelque chose de non défini et grandiose, en dominant la vie individuelle et même la vie totale d'une nation." Le Byzance de Iorga demeure comme un effort permanent de maintien sur la route de milieu entre cet Occident et cet Orient. Il est passionné par l'idée que la nation roumaine est le produit et la synthèse de cette époque.
Après la mort de Iorga, en 1939, ses disciples parmi lesquels Dobrogeanu Gherea, Eugen Lovinescu et Constantin Giurescu continueront à réécrire l’histoire sous l’influence magique de Iorga.

Quelques années plus tard, en 1948, dans le cadre du premier congrès du Parti Communiste Roumain, on déclare « que le Parti Communiste, groupant dans son sein les membres les plus avancés de la société - se fonde sur la doctrine marxiste-léniniste, sur une haute conscience de la responsabilité historique qui lui vient, dans la transformation révolutionnaire de la société, dans la suppression de l'exploitation de l'homme par l'homme et dans la construction du communisme en Roumanie ». C'est dans ces lignes que l'histoire politisée sera présentée dans les manuels scolaires, en commençant avec les années 1950. L'orientation générale de l'histoire est fixée par le développement des forces productives, par les applications scientifiques aux domaines des industries. Le nouveau temps historique roumain est un temps étouffé par des non-valeurs, qui radicalisent la période moderne roumaine dans la forme d'une "lutte continue pour le communisme". Même du point de vue linguistique, on change le terme "Temps", auxquels on se référait au pluriel-"timpuri" par le nouveau temps historique qui devient singulier "timpul" et le langage des manuels scolaires est de plus en plus penché vers la "scientificité du langage". La « nouvelle histoire » politisée des dernières cinq décennies réussira à confondre un certain nombre de consciences nationales. On remarque néanmoins un phénomène très intéressant, que je définirai comme « Un réfrigérateur de traditions ». C'est dans ce cadre que les familles intellectuelles roumaines se donneront la peine d'élever leurs enfants dans l'ombre du passé pré communiste. On va se pencher plutôt sur la lecture des ouvrages historiques traditionnels. On parlera beaucoup de la période de l'entre-deux-guerres comme d'une époque dorée de la Roumanie. La conscience nationale ne va pas emprunter le modèle de la conscience communiste. Dans ce « réfrigérateur de traditions », Iorga sera lu comme la source de vérité historique. Cette « dissidence historique » sera maintenue aussi par certains professeurs de lycées spécialisés de philologie histoire. Le langage des manuels scolaires est profondément vulgaire; les termes « époque fleurissante et développement continu » dominent les pages. Comme la situation politique et économique va se détériorer de plus en plus, le manque de concordance entre la vie quotidienne et sa représentation dans l'éducation obligatoire aboutit par créer un univers chaotique pour les élèves. Entre la vision nationale de la latinité des roumains et l’histoire politisée des derniers décennies, la place occupée pour traiter de l’histoire des autres ethnies vivant en Roumanie, notamment les hongrois, qui constituent aujourd’hui plus de 10% de la population du pays- demeure très limitée et inexacte. La façon de présenter le "phénomène" hongrois dans les manuels d’histoire nationale a été la refléction d’une population "de provenance barbare, qui s’est infiltrée sur le territoire roumain, pour ainsi diminuer la force de sa latinité". Plus que ça, le problème territorial "roumain" a été présenté aux élèves d’une façon très dénaturée, comme si la population hongroise de la Transylvanie, avait invadé les territoires roumains. En effet, la Roumanie avait récupérée une grande partie de la Transylvanie hongroise, après les Traités de Versailles (la Roumanie faisant partie de "La Petite Entente"). Toutes ses detournoures de l’histoires confondent et entretiennent le nationalisme exacerbé roumain et on l’a vu lors de la crise du pays voisin ex-yougoslave jusque-là les conflits ethniques peuvent'ils emmener une nation... Une révision systématique et une rénovation de l’enseignement de l’histoire pour ainsi mettre l’accent sur le rôle des ethnies laisseront à l’enseignant le reste du poids de cette « culture critique », une des causes de difficultés qui éprouvent les enseignants d’histoire dans ce type de sociétés. Comment est ce' qu'on pourra arriver à influencer les structures éducationnels dans ces pays sans faire appel aux menaces de non intégration régionale (la dernière des méthodes de négociation) sera un autre thème de débat dans ce projet de recherche.

III. APPROCHE METHODOLOGIQUE: En raison du caractère récent du programme de "Culture de Paix" de l' Unesco, il existe encore peu de recherches, en dehors de celles effectués dans les programmes régionaux mentionnés. En revanche, de nombreux travaux sociologiques sur le conflit sont disponibles. J'espère aussi pouvoir participer fréquemment au cours de Michel Wieviorka, sur "La Sociologie du Conflit", ainsi que continuer la recherche avec l' Université de Sociologie de Madrid. Pour ce qui concerne le thème de l' éducation, je compte analyser en profondeur le problème ethnique roumain, les étapes de changement du curriculum d' histoire nationale, ainsi que la consultation des Archives de Bucarest; je compte aussi effectuer des interviews avec les intervenants concernés. J’essayerais élargir ce thème de réflexion aux autres sociétés "critiques", en faisant de la recherche, lors de mes missions de consultance avec l’Unesco. Le thème de la communication et de l’information sera abordé dans la logique présentée dans mon projet d’études. J’espère continuer avoir les conseils précieux de M. Dominique Wolton et de M. Marc Ferro, pour ce qui concerne la partie cinéma. Aussi, je compte effectuer un documentaire, en interviewant les divers intervenants concernés. (J’ai bien compris que ce ne serra pas accepté comme faisant partie du travail de thèse à l' EHESS et c'est pourquoi j’essaierais travailler cette partie auprès de l' Université Paris VIII). A partir de l’ensemble de ces publications et interviews, je souhaite analyser les facteurs sociologiques qui ont mené (où qui risquent de mener aux conflits), ainsi que les différentes positions prises par les secteurs respectifs des sociétés civiles à analyser.

Je vous remercie respectueusement d’avoir étudié ce projet de recherche

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6. CHOMSKI, Noah: Worls Orders Old and New, Pluto Press, London, 1994

7. CRUBELLIER, M: Enseigner l’histoire, Analyse historique d’un malaise, Histoire de l'Education, Nr. 26, Mai 1985

8. DE ROUET, J.L. Les savoirs scolaires dans une société critique: « L’enseignement de l’Histoire de la Révolution Française: Défi a la Sociologie, UQUAM, Septembre, 1994

9. DOWNS, R.M. Maps in Mind, New York, 1992

10. DURKHEIM, Emile: L’Education Morale, Presses Universitaires de France, 1994

11. Ibidem: Leçons de Sociologie- Quadrige, Presses Universitaires de France, 1993

12. FORQUIN: Ecole et Culture, Le Point de vue des sociologues britanniques, Bruxelles, de Boeck, Ed. Universitaires, 1993

13. GRAMSCI, A: Marxisme et Culture, Oeuvres Choisies, Paris, 1959

14. HALIMI, Serge: Article dans « Le Monde Diplomatique », Février, 1995

15. IORGA, Nicolae : Natiunea Romana - Intre Cultura si Mit, Editura Universitaire, Bucuresti 1937? INALCO
16. Istoria Arhivelor Romanesti, Editura Stiintifica si Pedagogica, Bucuresti, 1981

17. KLAFKI, W: Pedagogical Forum, January, 1993

18. LEDUC, J. Marcos Alvarer V: Construire l’Histoire, CRDP, Midi, Pyrenees

19. LOVINESCU, Eugen : Istoria Civilizatiei Romane Moderne, Institutul N. Iorga, Bucuresti,1942

20. LOVINESCU, Monica: Posteritatea Contemporana, Bucuresti, Humanitas, 1994

21. MACHIAVELLI: Il Principe

22. MANUAL de Istorie de Clasa a 12 a-Editura Tehnica si Pedagogica, Bucuresti, 1987

23. MALITA, Mircea : Nicolae Iorga, Istoric al Bizantului, Casa Scinteii, Bucuresti, 1975

24. NORA, P: Lieux de Mémoire, Paris, Gallimard

25. NORA, P: Ernest Lavisse: son rôle dans la formation du sentiment national , Revue historiographie, Juillet 1962, PUF

26. NYOYO; J: Introduction a la Pédagogie Globale, Bafoussam, 1992

27. POLLACK, M: « Le témoignage » Actes de la Recherche en Sciences Sociales, Nr. 62/63, juin, 1986

28. PROST, Henri : Le Destin de la Roumanie, Paris, Berger, Levraut, 1954

29. SUN TZU, : The Art of War

30. TAYLOR, Philip: War and the Media, Manchester University Press, 1992

31. TCHACOTINE: Le viol des foules par la propagande politique, Gallimard, 1939

32. UNESCO: Rapport Mondial Sur l'Education, 1991, Paris

33. Ibidem: UNESCO and a Culture of Peace, 1995

34. Ibidem: Jacques DELORS for the International Commission on Education for the Twenty-first Century, Octobre,1995

35. Ibidem: Action Programme to promote a Culture of Peace, Paris, Septembre, 1993

36. WOLTON, D: Cours « La Production de l’Information »IEP, Paris, 1995

37. WIEVIORKA M et WOLTON D: Terrorisme à la Une, Gallimard, 1987

38. WIEVIORKA, Michel: Cours "La Sociologie du Conflit" EHESS, Paris, 1995

39. WIEVIORKA, Michel: "La démocratie à l'épreuve" Editions La Découverte, Paris 1993

40. World Bank: Education in Sub-Saharan Africa, Washington, DC

41. Discussions et interviews avec: Raphael Pintor (Catedratico de Sociolgia, Madrid), Paul Lewis (NY Times auprès de l’ONU), Fred Ekhard (Porte Parole du SG. ONU), Bernard Estrade (AFP), Lesley Atherley (Directeur Programme « Culture de la Paix »-UNESCO), Daniel Janicot (DDG, UNESCO), Kofi Annan, Sous-Sécretaire Géneral pour les missions de maintien de la paix (auprès de l' ONU), Jacques DELORS, President de la Commission « L’Education pour le 21eme siecle aupres de l’UNESCO » M. Michael SHEEHAN, Directeur des Programmes Internationales a la Maison Blanche, National Security Council, Alexandra BANIC, Senateur Americain, Millicent WHITE, Directeur

 

 
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